mercredi 16 janvier 2019

Body Double (1984) de Brian De Palma

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Controversé au moment de sa sortie, ce film l'est encore tout autant aujourd'hui. Revu avec des amis, aucun d'entre eux ne l'a vraiment aimé, dubitatif sur ce thriller qui énerve par l'inaction de son (anti)héros, qui désarçonne par son second degré teinté de mauvais goût, me laissant seul dans ma fascination perverse presque embarrassante.
Je conserve un souvenir troublant de ma première vision (je devais avoir 12 à 14 ans), révélant des formes étranges de conception du monde, leur part libidinale inavouable.
Aimer ce film, c'est réaliser son coming out. I like to watch dit le héros devenu acteur porno. Sans ce fétichisme, le scénario du film ne peut se déployer. Sans voyeur-spectateur, le cinéma n'existe pas et on le savait depuis Fenêtre sur cour, oeuvre de référence du film au même titre que Vertigo (la claustrophobie remplaçant le vertige et le double et même la nécrophilie s'immisçant également dans les interstices de 'histoire). De palma pousse le vice jusqu'au mauvais goût, en s'inscrivant en plein dans son époque, les années 80 dont il moque les tendances du moment (en prenant le risque de déstabiliser son spectateur en l'exposant dans une certaine outrance) du bling bling, à la vulgarité issue du porno, qu'il porte à son paroxysme dans la scène du centre commercial, moment ultime de fétichisme avec la cocasserie et le trouble associés.
Le héros incarne l'homme écartelé par ses désirs, qui ne peut sortir de sa dualité en aimant autant la grande bourgeoise (avec qui il flirte en imaginant une sexualité torride identique à ses réminiscences voyeuristes) que l'actrice porno avec qui il se rappelle le romantisme évanescent de l'élégante dame.

Rythmée par la petite musique entêtante du génial Pino Donaggio, De Palma nous concocte encore quelques scènes virtuoses et tend - comme souvent - à combler son désintérêt pour des scénarii parfaitement maîtrisés (l'histoire qui m'avait fasciné à l'époque m'est apparu rapidement élucidable grâce aux gros indices livrés).
Le décor hollywoodien est central, il rejoint au fond Mulholland Drive parmi ces films sur l'illusion d'Hollywood et le destin des acteurs / actrices ratés qui y galèrent, ici un héros qui se retrouve au chômage et finit dans le porno ou le film d'horreur érotique pour gagner sa vie . Derrière l'excitation du lieu magique et des promesses de puissance (sexuelle forcément), la solitude se manifeste dans ces fausses amitiés, ces amours trahis, dans ces lieux de vie que l'on imaginerait bondés et vivifiants que sont un centre commercial ou une plage mais qui se révèlent fades, dans un monde désenchanté. 
Pur objet de fantasme, Body Double laisse au bord du chemin les regards désabusés par un film "surréaliste" comme me dira une amie mais démasque ses adorateurs



Note : ****

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